Stressed out - Briarthur

Wish we could turn back time, to the good old…AAAAAARGH. Serrant les poings, Arthur se força à respirer. Le casque sur les oreilles, les fesses sur le canapé du studio, il poussa sa guitare sur le côté. Frustré, il était frustré. Ses doigts tremblaient et il sortir un paquet de cigarettes pour en allumer une. Il aurait voulu quelque chose de plus fort mais ils commençaient l’enregistrement de leur prochain album dans quelques heures et il fallait qu’il soit en forme. Tirant sur la cigarette, il observa la fumée. Il n’y arrivait pas. Il bloquait, comme à chaque fois. Ces premiers enregistrements étaient « juste pour voir », ils étaient encore en train de faire des concerts pour leur troisième album, mais il bloquait déjà. Chaque fois qu’ils recommençaient, il pensait à Kai. Et cette fois-ci, il y avait les revenants. Ces fichus revenants. Et pas lui. Aucun signe de lui. Ce qu’il aurait donné pour qu’il chante à sa place. Mais cette chanson n’avait pas été créée pour sa voix, non. Elle avait été dessinée pour lui, Arthur Fawkes. Et il était infoutu de la chanter correctement. Fermer les yeux. Inspirer le tabac. Et se laisser porter, juste deux secondes, avant de retourner au travail. Qu’on ne se méprenne pas, il adorait la musique. Mais de temps en temps, elle se faisait capricieuse et refusait de couler, comme elle le faisait avant. Parce que lui n’était plus comme avant, il s’en rendait bien compte.

Sa cigarette était terminée. Et … une part de lui savait que cela n’avait pas été suffisant. Soupirant, il attrapa sa baguette : Spero Patronum.  La souris se dessina, non sans mal, et il lui confia un message pour quelqu’un qui pouvait l’aider. Il était tôt, bien sûr, mais d’expérience il savait qu’elle serait levée ou en tous cas réveillée. Et rien ne l’empêcherait d’ignorer son message si elle le désirait. Mais il avait besoin d’elle. De Briar, de celle qui avait mis ces mots et ces accords en forme pour la seconde fois, pour eux. Et qui avait toujours le chic pour le débloquer, sans qu’il sache comment exactement. Elle était unique, et si précieuse … et elle n’en avait pas la moindre idée, ce qui ajoutait encore à son charme discret. Il était prévu qu’elle soit là pour l’enregistrement, de toutes les manières, discrètement, avec Roxie, sans que personne ne sache quel était son réel rôle dans tout ceci. Mais il serait alors trop tard pour qu’elle lui prodigue ses précieux conseils. C’était maintenant qu’il voulait qu’elle le guide comme elle savait si bien le faire. Et dire que ça avait été un jour son rôle … et qu’il n’arrivait pas à le faire pour lui-même. Peut-être que s’il se mettait dans les bonnes conditions … Se levant, il passa de l’autre côté de la vitre, là où il devrait prendre place dans quelques heures. Pianotant sur sa guitare, il leva les yeux au ciel. C’était encore pire. Il pouvait sentir ses mains devenir moites et son esprit s’embrouiller. Fermer les yeux. Essayer de se calmer. Ralentir son rythme cardiaque. Poser les doigts sur les cordes. Inspirer, Expirer. Wish we could turn back time, to the good… Non. Non. Non. Il laissa tomber sa guitare, frustré, tournant le dos à la vitre, les mains dans les cheveux. C’était un cauchemar.

[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]Le crayon danse sur la feuille. Les mots sont rayés, remplacés, raturés. Les notes sont effacées, refaites, recrées. Le crayon se stoppe une minute. Puis la danse recommence. Elle n’est jamais vraiment satisfaite Briar. Son œil est trop critique, trop affûté. Dans son travail, elle voit mille défauts et si peu de qualité. Parfois elle se demande pourquoi Arthur a voulu lui laisser sa chance. Pas assez douée, pas assez forte. Elle va échouer. Elle va échouer. Alors pourquoi rester ? Pourquoi même essayer ? Surtout quant à la peur de l’échec s’ajoute celle d’être reconnue, d’entrer dans la lumière sans même vraiment le vouloir. Etre vue. Cesser d’être faite de poussière et de fumée. D’être l’ombre invisible et inconnue.

C’est un risque qu’elle prend

Mais plus les jours passent et moins elle se sent prête à retourner dans l’obscurité et l’anonymat. Dans les jobs misérables et mal payés. De ne plus les voir. Plus un visage familier. Plus même l’espoir d’un sourire amical. Les ténèbres ont un goût de cendre. Et elle a trop connu le néant pour pouvoir l’apprécier. D’un geste elle repousse la feuille et passe une main dans ses cheveux. Non, revenir en arrière ne lui parait plus être une option. Et ce même si cela serait sans doute le plus sage, après tout elle ne sait toujours pas. S’Il est revenu … ou pas. Un soupir quitte ses lèvres, ses paupières se ferment un court instant. Briar devrait continuer à travailler, mais elle n’est plus d’humeur. Elle reprendra une autre fois, au milieu de la nuit, ou au petit matin, lorsqu’elle est encore trop embrumée pour sentir les affres de la peur et de l’anxiété.  Dans ce court moment parfait ou sa tête n’est remplie que de mots et de notes et que le reste n’est qu’un flou de sentiments inutiles.

La blonde s’apprête à se lever, à partir. Mais soudainement apparait devant elle une souris vaporeuse qu’elle reconnaitrait entre milles. Le patronus d’Arthur. Cela ne peut vouloir dire qu’une chose. Il a besoin d’aide. De son aide à elle. Et même si elle ne sait pas toujours comment le soutenir, elle ne peut qu’essayer. Elle sait que pour lui, rien n’est facile. Prendre la place de quelqu’un d’autre. Quelqu’un d’aimé, de respecté. D’un geste rapide, Briar se saisit de ses affaires, rassemble les feuilles de papier griffonnées. Elle part. Avant de le retrouver, il faut seulement qu’elle fasse un arrêt rapide.

Lorsqu’elle arrive il est assis, derrière la vitre, les doigts glissants sur la guitare. Hésitants. Une fausse note et il lâche l’instrument, ses mains venant s’emmêler dans ses cheveux. Elle peut entendre son soupir de rage. Peut le comprendre. La blonde entre dans la pièce, silencieuse. S’arrête derrière lui. « Tu n’y arrive pas ». Ce n’est pas une question. Une affirmation seulement. Briar connait Arthur maintenant. Lui et ses doutes. Elle ramasse la guitare doucement, la replace hors de portée, contre un mur. « Pourquoi ne pas prendre une petite pause alors ? De toute façon, dans cet état tu n’arriveras à rien » Il est bloquée, frustré et en colère. La russe peut le sentir d’ici. Elle connait ces émotions un peu trop bien, elle aussi. Finalement ils sont semblables. Tous deux projetés à des postes ou ils ne se sentent pas à leur place, sans pourtant accepter de lâcher.

Briar se retourne, saisit la tasse qu’elle avait posé sur une table derrière elle. « Café ? » malgré ses nombreuses années passées en Angleterre, elle ne parvient toujours pas à se faire au goût si particulier du thé – du foin bouilli si on lui demande. « Alors ? Qu’est-ce qui bloque aujourd’hui ? Quelque chose avec la musique ? Le texte ? » L’insécurité demeure malgré le masque mis en place. Elle ne peut s’empêcher de douter, Briar, de se demander si ce n’est pas elle qui le tire vers le bas.
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Tu n’y arrives pas. Il ferma les yeux de nouveau quelques instants, l’espace d’un souffle. Le temps d’apprécier les mots, justes, qui venaient de l’atteindre. Ses épaules se relâchèrent très légèrement, presque imperceptiblement. Elle était venue. Il n’en avait pas vraiment douté, même s’il aurait compris également qu’elle s’abstienne. Briar. Une bulle d’oxygène, un talent qui s’ignorait. Et pourtant, si seulement elle pouvait se rendre compte du point auquel elle était importante, indispensable même ! Non, il n’y arrivait pas. Elle avait le don de mettre en paroles simples l’ouragan qui faisait rage en lui. Et ça l’ancrait dans le présent, même si ça ne l’en sauvait pas. Lui permettait de faire une halte, et le point. Il la laissa s’approprier l’espace, son parfum délicat envahir la cabine d’enregistrement avant d’oser bouger. Il reconnut le raclement de la guitare contre le sol, le doux cognement contre le mur. Il pivota, pour pouvoir la regarder. Il y avait toujours ce je-ne-sais-quoi d’apaisant, dans la mise simple et discrète de la jeune femme, comme une parenthèse dans ce monde de brut, qui le touchait au plus profond de son être. Il respirait mieux, déjà. Un peu. Pourquoi ne pas prendre une petite pause alors ? De toute façon, dans cet état tu n’arriveras à rien. Un simple hochement de tête, il se laissait le temps de revenir, pour que ses émotions n’explosent pas dans cet espace trop confiné, au risque de briser la jolie poupée qui se tenait en face de lui.

Il ne rouvrit la bouche qu’en acceptant la tasse qu’elle lui tendait, avec grand plaisir, pour lui dire simplement : Merci. Pour le café, d’être venue, d’être ce qu’elle était. Sa voix était un peu rauque, cassée par la cigarette qu’il venait de terminer et l’épuisement de ne pas y arriver. Il allait prendre une gorgée mais se suspendit en plein vol alors qu’elle demandait : Alors ? Qu’est-ce qui bloque aujourd’hui ? Quelque chose avec la musique ? Le texte ? Mais non ! Il se tut immédiatement, se rendant compte qu’il était encore trop « parti dans les tours » pour s’exprimer correctement. S’exclamer de façon offusquée n’allait aider personne. Il marqua une pause, avala une gorgée de café brûlant qui calma ses ardeurs. Pas du tout, reprit-il de sa voix douce et un peu rauque, cherchant le regard de la demoiselle. Le texte et la musique sont parfaits, comme d’habitude. C’était une certitude. Les paroles l’avaient touché en plein cœur, le groupe s’était emparé de la mélodie extrêmement rapidement et simplement, bref, il n’y avait rien à jeter. Sauf … C’est moi, le problème, comme d’habitude souffla-t-il, sans ajouter la dernière partie. Parce qu’il n’y parvenait pas. Parce qu’il ne serait jamais Kai. Et parce qu’il lui manquait cruellement, même après toutes ces années, chaque fois qu’il prenait le micro. Il secoua la tête, se sentant lamentable. Ca ne veut pas venir. J’ai lu les paroles, je les connais, chaque phrase. Je connais la rythmique, je l’ai marquée. J’ai joué le morceau, les accords coulent, je sais où placer mes doigts. Mais ... Mais dès qu’il devait tout superposer, même quand il n’avait pas à jouer, quand la musique démarrer, il se perdait. Parce qu’il était trop dans l’émotion. Et pas dans la musique. Il se débattait, où avait il n’avait qu’à se laisser porter par le courant. Et il était perdu. Il lui adressa un petit sourire fataliste et désolé à la fois : Comme d’habitude, quoi. Oui. Comme d’habitude.