1934Épuisée, frigorifiée, Nikky avance en titubant. Les rues boueuses de Leningrad ne ressemblent en rien à celles pavées de Londres. C'est bien, c'est différent. C'est ce qu'elle voulait, enfin sûrement. Elle n'est plus vraiment sûre de ce qu'elle est venue faire ici tout à coup. Le froid n'est pas le même non plus, et elle resserre un peu plus son manteau tout en détaillant les alentours. Sa grand-mère lui avait parlé du froid russe, mais elle ne s'était pas attendu à cela.
Elle grelotte, remonte son ballotin sur son épaule en soufflant dans ses mains pour les réchauffer. Elle était partie si précipitamment qu'elle n'avait pas pris le temps de fouiller dans les placards pour trouver des gants. En pleurs, hurlant à son père à travers la porte de la laisser tranquille, elle avait fourré des affaires au hasard dans son sac, avait attrapé son gros manteau rouge, une écharpe, un bonnet, et s'était enfuie de la maison en courant. Et là voilà, quelques heures plus tard, errant dans les rues de Leningrad sans savoir où aller. Elle était partie sans plan, sans réfléchir, la colère et la terreur prenant le dessus sur la raison. C'en était trop, trop. Elle ne pouvait plus rester là-bas, elle ne pouvait plus supporter ce monde magique qui lui avait tout enlevé. Sa mère, sa sœur... Sa main s'enfonce dans la poche de son manteau et se saisit des débris de sa baguette. Ces morceaux de bois qui avaient un jour émerveillé une petite fille de onze ans ne représentaient plus qu'un symbole abject de tout ce qu'elle détestait. Tout ce qu'elle fuyait, tout ce qu'elle aimait toujours, putain, plus que tout.
Bastian. Elle l'aime toujours, et pourtant elle ne peut plus supporter de le regarder et de voir l'incompréhension et la peine dans son regard. Une larme rageuse s'écrase à ses pieds, et elle jette ces débris sur le sol avec le peu de force et de hargne qui lui reste. Elle ne pouvait plus rester, et il ne pourrait jamais partir. Ils n'y avait pas d'autre issue pour eux. Sa vie se ferait ici à présent.
Nos vies, se dit-elle en touchant son ventre de la main dans un geste presque inconscient. Elle ravale un sanglot et relève la tête. Il n'y a plus de retour possible maintenant.
1942« Nikky ! » Des bruits de mitraillette retentissent dans la rue adjacente et Nikky s'arrête brusquement derrière une voiture, restant à couvert. Bastian s'arrête derrière elle, Oksana dans les bras.
« Nikky il faut retourner dans la planque, » la presse-t-il alors que les combats font rage à quelques mètres d'eux. Elle se retourne mais ce n'est pas lui qu'elle regarde. Elle se baisse et réajuste le bonnet de Miroslav pour qu'il couvre bien ses oreilles avant de lui déposer un baiser sur le front. Oksana ne dit rien, cramponnée au cou de son père. Ils sont courageux, leurs petits, plus qu'il n'aurait pu l'imaginer. Cela fait des mois qu'ils ne pleurent plus lorsqu'ils entendent les bombes tomber.
« Nikky ! C'est trop dangereux. » Elle prend son fils dans ses bras et se relève. Ses yeux sont bordés de larmes, mais son regard est aussi déterminé que désespéré.
« Il n'y a plus rien à manger, » répond-elle avec hargne, comme si c'était de sa faute si les vivres avaient fini par manquer.
« On n'a pas le choix, Bastian ! Alekseï nous cachera, il - » Une détonation la coupe dans sa phrase, et tous les deux se baissent par réflexe, protégeant leurs enfants de leur corps autant qu'ils le peuvent. Des cris déchirants s'élèvent un peu plus loin, et les petites mains d'Oksana se resserrent autour de son cou. Bastian la serre contre lui, le cœur battant la chamade. Son regard croise celui de Nikky et ils s'observent pendant quelques secondes. Cela ne peut plus durer.
« On a toujours le choix, » déclare-t-il simplement, mais Nikky sait très bien où il veut en venir.
« Non, Bastian, je t'en prie... » Il ne l'écoute pas et fouille dans la poche intérieure de son blouson. Ses doigts se referment autour du bois réconfortant, et il sort la baguette de chêne pour la montrer à son épouse. Cela fait des années qu'il ne s'en est plus servi, depuis qu'il a rejoint Nikky ici.
« Il faut qu'on parte, Nikky, maintenant. » Elle secoue la tête faiblement et ferme les yeux, tenant Miroslav contre son cœur. Bastian ne s'arrête pas, laissant sa rancœur parler.
« On a déjà pris trop de risques. La magie est notre seule chance. Je ne risquerai pas leur vie – ta vie, pas une seconde de plus, tu m'entends ? » Il y a des cris, des balles qui fusent. Il y a la mort, la haine et la défense féroce d'une ville qui meurt mais refuse de se rendre. Il y a des familles qui se cachent, des corps qui jonchent les rues, laissés là mais pas oubliés. Il y a cette baguette dans sa main, et Nikky qui finit par acquiescer, des larmes coulant le long de ses joues. Elle lui prend la main et ils s'enlacent, tous les quatre, accroupis derrière une voiture.
1944Le soleil descend doucement dans le ciel, et sa lumière froide baigne les prés bordant la route. Ils font ce trajet tous les jours, harnachés de leur solides cartables de cuir, la jupe d'école d'Oksana voletant au gré de ses pas. Parfois ils se tiennent la main, parfois Miroslav regarde sa sœur sautiller devant lui. D'autres jours, comme aujourd'hui, ils marchent côte à côte sans rien dire, écoutant les gazouillis des oiseaux, s'écartant lorsqu'une voiture passe en pétaradant. La maison de leur grand-père est un peu loin du village, située à environ une demi-heure de marche, mais ils ne risquent rien. La guerre n'est pas venue les chercher jusqu'au fin fond de la campagne anglaise, mais elle est toujours là avec eux. En eux.
« Polina me manque. » Les mots s'échappent en un flot triste et mélodieux de sa bouche, dans le russe qu'ils se parlent entre eux. L'anglais leur reste une langue étrangère, qu'ils apprennent à manier un peu plus chaque jour. Miroslav s'en sort un peu mieux qu'Oksana, comme si une part d'elle se refusait à trop vite tourner la page. Il ne dit rien. Polina lui manque aussi. Et Anya, et Kassian.
« Et Anya et Kassian aussi. » Il la regarde, détachant ses yeux de la cime des arbres où les oiseaux se chassent dans un jeu peu différent de ceux qu'ont les enfants de leur âge. Miro sait quelles questions se mêlent à ces souvenirs mélancoliques ; sont-ils toujours vivants, est-ce qu'ils ont à manger, est-ce que la ville ressemble encore un peu à celle qu'on a connue ? Mais Miro aime cette campagne aussi. Il aime aller à l'école, il aime ses nouveaux amis. Et la maison de grand-père Lukas est plus grande et plus belle qu'aucune des maisons de leur ancien quartier à Leningrad. Et puis la magie. C'est ici qu'ils l'ont découverte, ici qu'ils ont tout appris sur leurs véritables origines.
Je suis un sorcier. Miro regarde ses mains, encore tout émerveillé par cette idée qui paraissait il y a quelques mois plutôt incongrue. Nana donne un coup de pied dans un gros caillou, qui finit sa course en un grand fracas dans un poteau de bois un peu plus loin, sortant son frère de sa rêverie.
Quand ils rentrent, la maison est silencieuse comme tous les jours. Grand-père Lukas est installé dans son fauteuil, à lire un de ces journaux qui ont les images qui bougent, tandis que leur mère s'affaire en cuisine, les manches relevées et le visage fermé. Avant, la maison se nettoyait toute seule, leur grand-père n'ayant qu'à agiter sa baguette pour que le ménage soit fait (Miro adorait le regarder faire de la magie). Mais leur mère avait fini par ne plus le supporter. Comme beaucoup de choses que fait ou que dit grand-père Lukas, d'ailleurs. Nana et lui savent bien qu'ils se disputent souvent quand ils montent se coucher. Depuis quelques temps, ils ne se parlent plus, sauf quand leur père rentre du travail le soir. Il travaille au Ministère de la Magie, maintenant. Il leur a promis que, quand la guerre serait finie, il les emmènerait voir un match de Quidditch. Miro a hâte de voir ça.
1946« J'veux pas aller à Poudlard. » « Tu dis ça parce que t'as la trouille. » « Non. Je m'en fiche de la magie. » « Moi j'aimerais aller à Serpentard, comme papa. Et que tu y sois aussi, avec moi. On serait toujours ensemble comme ça. » Elle soupire doucement, et regarde par la fenêtre, sans vraiment voir le paysage qui défile sous leurs yeux.
« On n'a pas toujours ce qu'on veut dans la vie, Mirolsav. » 1951Penché sur son devoir d'arithmancie, Miroslav se gratte le menton distraitement du bout de sa plume. C'est loin d'être sa matière préférée, mais il sait qu'il a besoin d'avoir les meilleures notes possibles à ses ASPICs pour pouvoir espérer une carrière dans la médicomagie par la suite. Installé à la table de jardin, il profite des premiers de rayons de soleil du printemps, pas encore très chauds mais ayant l'avantage de faire sécher les gouttes de pluie. Et quitte à travailler, autant le faire dans un environnement plaisant.
« Miro ! » Il ne lève pas la tête, trop absorbé par une équation particulièrement compliquée. Ce n'est que lorsque Nana s'écrase dans la chaise en face de lui, essoufflée, qu'il daigne lever les yeux. Les joues rosies et les cheveux collant un peu à son crâne, elle a apporté un verre d'eau avec elle et en boit une grande gorgée salvatrice.
« Il faut absolument que tu viennes voir ça, » dit-elle, les yeux rieurs et les paroles ponctuées de ses habituels grands gestes de la main.
« Les parents de Thomas Payne viennent d'acheter un nouveau tracteur... Il est énorme, tout rouge. Devine quelle marque ils ont pris ? » Sa plume toujours dans la main, Miroslav regarde sa jumelle d'un air peu convaincu.
« Un... un Renault ? » Elle pouffe de rire et fend l'air de sa main.
« Pas du tout ! Un Renault... ha ! Les Renault sont oranges. Mais non, bêta. Ils ont acheté un Massey Ferguson ! » Elle tape de la main sur la table pour insister sur ce point, et son visage prend une expression à la fois amusée et scandalisée.
« Si tu avais vu les têtes qu'ont fait la vieille Beth et son vieux croûton de mari en le voyant ! J'ai cru qu'on allait mourir de rire avec Nancy. » Elle rit de bon cœur, et ils échangent un sourire complice avant que le silence ne retombe entre eux, silence confortable et agréable après tant d'années passées ensemble. Il se remet à travailler, se démenant pour trouver une solution sous le regard amusé de sa sœur. Oksana se fiche bien des devoirs, préférant passer ses vacances à la ferme des Donovan. Miroslav ne se fatigue plus à lui demander de travailler, il sait que c'est inutile. Mais sa sœur elle... ne se lasse jamais de lui faire remarquer qu'il travaille trop.
« D'ailleurs, en parlant de Nancy... » Et voilà, ce n'était qu'une question de minutes. Miroslav soupire et ferme les yeux un instant avant de hausser un sourcil à l'attention de Oksana, qui le regarde avec un air espiègle.
« Nana, il faut vraiment que je finisse ce... » commence-t-il, mais elle l'ignore et continue sa phrase d'un ton presque chantant.
« Elle m'a demandé si tu serais là au bal du village vendredi... » Il rougit, et sa sœur a l'air bien trop fière d'elle à son goût. Elle joint ses mains et l'observe avec attention, un grand sourire sur le visage. Il baisse les yeux sur son rouleau de parchemin en feignant de s'y remettre, bafouillant une réponse inintelligible.
« Parfait ! Elle sera ravie de l'apprendre ! » Oksana se lève de sa chaise avec vigueur et s'en va dans un éclat de rire, laissant son frère tout penaud. Ce n'est pas encore ce soir là qu'il finira ce fichu devoir d'arithmancie.
1956C'est un dimanche matin pluvieux. Nikkylia et son fils s'affairent en cuisine, occupés à éplucher des pommes de terres du jardin. Cela va bien faire six mois que Miroslav n'a pas été de corvée de patate, tout comme cela va faire des mois qu'il n'a pas eu de dimanche de libre. L'avantage d'être diplômé, c'est de pouvoir enfin travailler selon un planning un peu plus humain que celui imposé aux stagiaires en médicomagie.
« Tu ne t'arrêtes jamais de travailler, hein ? Beaucoup seraient bien contents d'être médicomage, c'est déjà une grande fierté. » Le côté positif des matinées corvée de patate, c'est de pouvoir discuter avec sa mère. Miroslav a souvent remarqué que les travaux manuels rapprochent les gens de façon assez étonnante.
« J'aime ce travail, c'est sûr, mais être guérisseur serait encore plus intéressant. Et puis, c'est surtout la recherche qui me plaît. Il y a encore tellement de choses qu'on ne sait pas. » Nikky sourit, dépose une pomme de terre dans la passoire.
« L'éternel curieux. Et alors, quelle sont ces questions que tu te poses ? » « Tout un tas. Trop. » Il a un rire.
« J'ai beaucoup travaillé sur les effets corporels pendant mes études. Mais ma thèse se porte sur les altérations de l'esprit et du comportement. Des effets que certains sortilèges ont sur la mémoire, la volonté, ou la personnalité. Comment ils agissent, est-ce qu'on peut les contrer, y a t-il un moyen d'annuler leur effet ? » Un petit silence s'installe. Il sait que sa mère n'aime pas parler de magie, mais elle fait un effort pour lui. C'est sa passion, son travail sa vie. Alors elle se force à poser des questions, mais ça ne va pas plus loin.
« Cela va des plus petits Oubliettes jusqu'au sortilège de l'Imperium. Enfin, je ne sais pas si tu te souviens de ces sorts... » Sa mère laisse tomber une pomme de terre un peu plus brutalement dans la passoire et lui lance un regard noir.
« Bien sûr que je m'en souviens, fils, » dit-elle sèchement, de ce ton qu'elle utilisait avec eux quand ils étaient plus jeunes, lorsque sa sœur et lui essayaient de la berner.
« Ce n'est pas vraiment ce qu'on appelle de la bonne magie. » Aucune magie n'est bonne pour toi, pense-t-il, un peu agacé par son comportement. Il épluche sa patate sans rien dire, répétant des phrases dans sa tête, essayant de formuler ce qu'il a envie de dire sans que cela ne paraisse trop brutal ou que cela ne puisse froisser sa mère.
« Tu sais que les moldus font la même chose ? Ils n'ont peut-être pas de magie, mais ils ont trouvé d'autres moyens pour commettre les mêmes atroci- » « Je le sais, Miroslav, le coupe-t-elle,
je ne suis pas sotte. » « Alors tu conviens que ce n'est pas la magie le monstre, pas la magie l'ennemi ? Si on l'utilisait à bon escient la magie pourrait améliorer la vie de tout le monde, faciliterait le quotidien de milliers de personnes ; sans parler de ses applications sur la médecine, si l'on alliait la science moldue et la magie on pourrait - » « Tu ne me feras pas changer d'avis, Miro. Cette magie est un poison, dans les mains d'êtres bien trop corrompus pour pouvoir espérer en faire un atout. » Elle pointe son couteau vers la fenêtre, désignant il le comprend, l'humanité dans son intégralité en un geste vague.
« Tu as vu ce qu'ils ont fait avec leurs armes moldues ? » La ville assiégée, les bombes qui tombaient. Les corps recouverts de neige ensanglantée. Anya, Polina, Kassian. Et puis tout ce qu'ils avaient appris après, tout ce qu'ils avaient lu, entendu. Ce qu'ils apprenaient encore, tous les jours, dans les journaux.
« Attends un peu de voir ce qu'ils feront, avec votre précieuse magie. »1957Un verre de vin à la main, Miroslav s'assoit discrètement à côté de sa sœur sur le banc, et lui donne un petit coup de coude dans le bras.
« Ludwig Von Shaft, hm ? » Il lui adresse un regard pétillant, et elle lève les yeux au ciel, soupirant pour manifester son exaspération.
« Sérieusement, Miro. Je passe quatre ans à faire le tour du monde pour construire des maisons en Afrique, travailler avec les moldus, faire de la prévention, et toi tout ce que tu retiens c'est le nom d'un type que j'ai côtoyé ? » Il hausse les sourcils, jouant l'homme absolument stupéfait.
« Un type ? D'après ce que m'a dit Nancy, tu as fait bien plus que le côtoyer. Apparemment tu lui a raconté beaucoup plus de détails qu'à moi, j'en serais presque jaloux. » Elle grogne et lui donne une tape sur l'épaule avant de le pointer du doigt.
« C'est le genre d'histoires qu'on raconte à ses copines, pas à son frère. » « … Voilà, je suis vexé. » Ils se taisent pendant quelques secondes, observant les personnes réunies dans le jardin de leur vieille maison. Leurs amis, les parents de leurs amis, les connaissances du villages qui forment comme une grande famille après tant d'années. Oksana hoche la tête, regardant Nancy et Thomas qui discutent un peu plus loin.
« Nancy Payne, quand même. Et ils ont déjà trois enfants... » « Tu as quatre ans de potins du village à rattraper. » Elle a un reniflement dédaigneux.
« C'est sûr que je n'allais pas compter sur toi pour me les raconter. Je suis certaine que tu dormais sur le sol de ta salle de classe quand tu étais étudiant. » « Non quand même, ils me prêtaient les lits des patients décédés. » Ils rient, boivent un peu, appréciant le calme de la campagne et le son réconfortant de ces voix qu'ils connaissent si bien.
« T'aurais dû te marier avec Nancy, » finit par dire Oksana. Il lève les yeux au ciel.
« Et devenir agriculteur ? » « Non, je plaisante, mais bon... On aurait au moins eu une raison d'arrêter de lui mentir. » Ils ne peuvent jamais inviter leurs amis sorciers ici. Quand ils reviennent au village, ils s'inventent des vies. Miroslav a appris des tas de mots de médecine moldue afin de les placer dans ses conversations.
« C'est vrai que serait plus facile de pouvoir partager ça avec eux. » Oksana tourne sa coupe de champagne entre ses doigts, ses yeux fixant un point imaginaire sur la robe de Nancy. Elle a l'air tout un coup d'être ailleurs, ruminant des pensées, des souvenirs.
« Je le pensais aussi. Mais certaines personnes n'y sont pas prêtes, des deux côtés... Peut-être que c'est mieux ainsi. Pour l'instant, en tout cas. » Miro pose sa main sur celle de sa sœur, et elle referme ses doigts autour des siens.
1965« Non – Cali, descend de là ! » Elle se lève et s'avance vers son fils qui a décidé de grimper sur un de ces tabourets haut qu'on trouve dans les bars. L'appartement de Oksana est assez design, coloré, très à la mode moldue, au goût des tendances actuelles. Ça change des intérieurs traditionnels sorciers qui semblent encore bloqués au début du siècle. Dans la cuisine, les dernières inventions moldues au niveau électroménager. Un grille-pain, un four. Récemment, elle s'est acheté un lave linge – elle adore l'odeur de la lessive moldue. Elle se rassoit dans le canapé à côté de Miroslav en soupirant, attrapant sa tasse de café au passage. Le russe revient à ses lèvres naturellement, relaxant et confortable comme lorsqu'on enfile une paire de chaussons en rentrant d'une longue journée de travail.
« Il n'arrête pas. C'est un bon petit, je l'aime c'est sûr mais... il a beaucoup plus d'énergie que moi. » Elle rit, et ils observent Cali jouer sur le tapis du salon. Cinq ans déjà qu'il est devenu tonton. Comme le temps passe vite.
« Tu tiens le coup ? » Elle hausse les épaules et lui adresse un petit sourire las. Il sait que c'est dur pour elle. Son boulot au ministère la passionne – les relations avec les moldus, c'est son domaine – mais élever seule un enfant n'est pas chose facile tous les jours. Sa grand-mère le garde la journée, mais même pour elle il s'avère parfois difficile de maîtriser l'énergie parfois déroutante de son petit-fils. Sans père, c'est plus compliqué. Miroslav essaie d'aider Oksana du mieux qu'il peut, mais il n'a guère de temps libre, occupé comme il l'est à l'hôpital.
« Bien sûr. Il en faut plus pour me terrasser, tu le sais. » Ils échangent un sourire, sans avoir besoin d'en dire plus. Oui, il le sait, il l'a toujours su.
« Le boulot ? » Elle boit une gorgée de café, observant Cali du coin de l’œil.
« C'est assez tendu. » Ses doigts pianotent sur la tasse dans un geste nerveux.
« Ils nous ont encore retiré des financements. C'est ce que je te disais l'autre fois... C'est de pire en pire. On nous regarde de haut, et je ne te parle plus simplement de remarques désobligeantes faites dans le dos. » Elle le regarde dans les yeux, et la colère qu'il lit dans ses prunelles le désarçonne. Il cligne des yeux.
« Debbie a reçu une lettre d'insultes l'autre jour, après son article dans la Gazette. Traître à ton sang, fausse sorcière, voilà de quoi on l'a insultée. » Il hausse les épaules.
« Il y a toujours eu des gens comme ça. Les sorciers sont un peu lents, mais ça leur passera bientôt. Il y a de plus en plus de mixité, il faut juste que certains s'adaptent à ce changement. » Elle a un reniflement moqueur, et secoue la tête d'un air dédaigneux.
« Tu ne vois pas ce que je vois tous les jours. La situation s'aggrave. Bientôt ce ne seront plus des mots, mais des actes de haine, des - » « Ce ne sont que des vieux aigris, de ces vieilles familles qui ont du mal à voir leurs privilèges leur échapper ! » « Tu crois que ces affaires de moldus qui disparaissent un peu partout sont des histoires qui ne nous concernent pas ? Dis moi, toutes ces allégations des vieux purs dans la presse, toute cette haine gratuite, ça ne te rappelle rien ? » Elle s'est redressée, sa voix s'est élevée et ses yeux lancent des éclairs. Cali a laissé ses jouets en plan sur le tapis, et les regarde avec une fascination presque dérangeante. Miroslav fronce les sourcils, observant sa sœur avec scepticisme.
« Il n'y aura pas de guerre, Nana. Sors-toi cette idée de la tête. »1966Le champagne lui monte à la tête un peu trop vite. Il faut dire que ces verres qui se remplissent automatiquement sont un véritable piège, surtout quand on n'est pas un grand buveur. Mais c'est sa soirée, et ses collègues ne manquent pas de le lui rappeler.
Guérisseur en chef. Ça y est, il l'a fait. Il est officiellement à la tête du département Pathologie des sortilèges. C'est tout ce qu'il a toujours voulu et il y est enfin arrivé, alors il compte bien profiter de sa soirée comme il se doit – sans pour autant se ridiculiser, car il a une réputation à tenir désormais.
« Félicitations M. Krüger, vous le méritez. » Il cligne des yeux, manquant de s'étrangler avec la gorgée de champagne qu'il est en train de boire. Quand on parle de se ridiculiser... Il se retourne, tentant de garder contenance tant bien que mal. C'est Jane Adkins, une jeune accoucheuse travaillant quelques étages en-dessous.
« Merci, Mademoiselle Adkins. » Il lui adresse un sourire aussi radieux que le permet son état émotionnel actuel : la panique. Jane est ravissante, comme d'habitude, mais elle paraît tout bonnement irréelle après trois coupes de champagne. Il l'a rencontrée par hasard, au réfectoire, quelques semaines plus tôt. Chaque fois qu'il la voit, son cerveau semble quitter le navire, le laissant bafouiller quelques vaines amorces de conversation terriblement ennuyantes.
« Je... Me demandais si... si... » Il se racle la gorge. Son sourire s'élargit, et elle lâche un petit rire amusé. Il se dit que pleurer de honte n'est pas une option, alors il se contente de faire comme elle et rit lui aussi, incapable de savoir comment terminer sa phrase sans se noyer dans son verre par la suite.
« Si j'ai quelque chose de prévu ce soir ? » Elle le regarde, les yeux pétillants, et Miroslav sent son cœur manquer un battement
« Non. Et vous ? » 1969« Jane. » Il pose la main sur son épaule, lui caresse doucement le dos. Elle ne bouge pas, assise sur le bord du lit, fixant un point imaginaire sur le mur en face d'elle.
« Jane. » Il dépose un baiser au creux de sa nuque, un autre sur la douce peau de son cou. Jane ne bouge pas. Sur le sol gisent des parchemins médicaux, ainsi qu'un tas de feuilles d'un dossier provenant d'une clinique moldue. Miroslav voudrait tous les jeter, les brûler, il voudrait qu'elle les oublie une bonne fois pour toute.
« Ça ne change rien, tu le sais. » Il couvre sa main de la sienne, entrelace leurs doigts ; c'est à peine si elle réagit. Comme si sa présence n'avait plus aucun sens, comme s'il ne pouvait plus l'atteindre. Ils avaient tout essayé.
Stérile, lui avait-on annoncé, dans ce même service où elle travaillait depuis bientôt six ans. Il ne sait pas si elle a vraiment dormi depuis. Il ne saurait dire combien de mots se sont échappés de sa bouche d'ordinaire si expressive.
« On aurait pu l'appeler Mary. Ou Annie. » Sa voix semble lointaine, détachée, et son regard ne bouge pas d'un pouce. Elle ne pleure plus, ne réagit plus. C'est presque pire, pire que de la voir souffrir. C'est comme si elle n'était plus là. Il ne sait plus quoi dire, plus quoi faire pour l'aider. Alors il se contente d'être là et de la serrer dans ses bras.
Sous réserve d'acceptation de la particularité magique :- Spoiler:
1971
« Prête ? » Elle inspire lentement puis acquiesce, une intense concentration sur son visage. Il lève sa baguette. « Legilimens. » C'est comme prendre un portoloin pour on ne sait où, et se retrouver perdu dans un blizzard, à chercher son chemin. Avec un peu de volonté, il finit par trouver un mur quelques mètres plus loin qui semble surgir de nulle part. Il touche la pierre froide et humide du bout des doigts, et longe la muraille en bravant les bourrasques de vent. Il serre les dents Miroslav, poussant un peu plus loin, accentuant la pression. Une porte se dessine sous ses doigts, le bois remplace progressivement la pierre. Il y a une secousse, comme un tremblement de terre, et il titube, se rattrapant de justesse à la poignée en fer forgé. Le vent s'intensifie, et Miroslav commence à avoir du mal à respirer. Va-t-en ! Il s'accroche à la poignée, ancre ses pieds dans la terre et pousse de toutes ses forces. La porte s'ouvre devant lui, et il est emporté dans un tourbillon d'images et de sensations qui lui donnent le tournis : la neige qui tombe le matin de noël à Leningrad, le visage souriant de leur mère. Le bruit sourd des bombes et les corps d'enfants gisant dans la rue. La ferme des Donovan, le bal du village, le rire de Miroslav. La colère de Ludwig – Monstre ! Démone ! La main d'Oksana qui caresse les cheveux de Cali. La marque des ténèbres qui semble déchirer le ciel. Des sorts qui illuminent la nuit, sur le sol devant elle, un de ses camarades – David McLee – tombé au combat. Cali qui monte dans le train et lui fait signe, s'éloignant d'elle vite, bien trop vite...
Elle hurle. Miro titube et manque de tomber en arrière, s'accrochant à la table derrière lui. Il met une seconde à s'ajuster au retour à la réalité, puis se précipite sur Oksana qui est en nage, et en pleine crise de nerfs. Il pose les mains sur ses joues, essayant de capter son regard. « Nana ? Nana je suis là. » Elle s'agrippe à ses poignets, respire et ferme les yeux. « Je n'y arrive pas, je n'y arrive pas... » Il lui caresse les cheveux. « C'était mieux déjà, tu m'as repoussé un peu plus longtemps. » Ils s'entraînent dès qu'ils le peuvent, chacun leur tour essayant de repousser les limites mentales de l'autre. C'est éreintant, mais nécessaire. C'était Oksana qui l'avait embarqué dans l'Ordre, Oksana qui acceptait mission sur mission, se jetant dans cette guerre avec hargne et conviction. Il avait accepté de la suivre, mais avec la condition qu'elle s'entraîne avec lui à l'art difficile de l'occlumancie. Elle avait refusé, au départ. Soit on gagne, soit on meurt, avait-elle dit, pas de place au mensonge. Il lui avait suffi de mentionner le nom de Cali pour la faire changer d'avis. « Je ne peux pas faire le vide Miro. C'est trop... il y a tellement de... » Ses mots se perdent dans le flot de ses pensées et dans la fatigue qui l'assaille. Mais il sait, il comprend. « On y arrivera, Nana. Ensemble, comme toujours. » Il lui adresse un petit sourire entendu et lui tend sa baguette. « A toi de jouer. »
1973Si l'enfer existe, il doit ressembler à ça.
Les maisons embrasées, des corps de moldus et de sorciers qui recouvrent le sol boueux. Le village dévasté illuminé par la lumière verdâtre de la marque des ténèbres. Il avance, enjambant les cadavres sans les voir.
C'est son père qu'il trouve d'abord, étendu derrière l'église. Il est tombé baguette à la main, à quelques mètres de son épouse. Les mains tremblantes, le cœur au bord des lèvres, son fils s'accroupit à ses côtés et rabat ses paupières.
Soit on gagne, soit on meurt. Sa mère est allongée quelques mètres plus loin, agitée de spasme, la respiration saccadée. Les yeux grand ouverts, elle fixe les nuages mais semble ne rien reconnaître, pas même le visage de Miroslav. Ses mains s'activent il ne sait comment, ses lèvres murmurent des sortilèges apaisants sans même qu'il ne réfléchisse. Quelqu'un a pris le volant, mais ce n'est pas lui. Il agit, mais lui n'est plus là. Sa mère s'endort sous l'effet de ses soins, et il se relève tel un damné, cherchant ce que son esprit ne peut concevoir.
On serait toujours ensemble, comme ça.Elle est là, un peu plus loin. Il chavire, trébuche, mais avance encore avec peine. Ses cheveux blonds traînent dans la terre, et elle porte sa veste préférée. La orange, celle avec les boutons roses.
Il étouffe, peine à respirer et tombe à genoux dans la boue. Ses mains saisissent son épaule avec une infinie délicatesse, et lorsqu'il la tourne vers lui il espère encore un peu découvrir un visage différent du sien. Un gémissement s'étrangle dans sa gorge alors que ses doigts terreux viennent caresser la joue de celle qu'il ne pouvait pas perdre. Pas elle. Pas elle. Pitié, pas elle.
On n'a pas toujours ce qu'on veut dans la vie, Miroslav.1974« Ce gamin n'est pas normal, Miro. » Le journal ouvert devant lui, ses yeux traversent la page en diagonale, scannant les nouvelles sans les comprendre.
« Il me fait peur, parfois. » Il prend une gorgée de bière, machinalement. Un geste salvateur.
« Tu m'entends, Miro ? » 1975Antony Wedge, un sorcier généreux, un homme bon. Miroslav l'a bien connu depuis son arrivée à l'Ordre. Mais il est mort aujourd'hui, comme beaucoup d'entre eux. Jeune, trop jeune pour partir. Il est peiné de le retrouver étendu sur le sol de sa chambre, vérifie sans espoir son pouls. Mais il n'y a pas que lui, il le sait. Il n'est pas venu que pour Antony.
« Rosalie ? » appelle-t-il doucement en regardant sous le lit. La petite fille est là, prostrée, terrifiée. Miro n'oubliera jamais ce regard, ces prunelles si pures et si dévastées.
Pardonne-moi, murmurera-t-il plus tard, pointant sa baguette sur la forme endormie de cette enfant qu'il appellera désormais sa fille. Son esprit remodèle les souvenirs, efface les noms, les mentions de l'Ordre et de la guerre. Elle ne doit rien savoir. Ils ne doivent pas pouvoir la remettre en question.
Pardonne-moi.
1979A mon épouse. A ma tante. A ma mère. La plaque est sobre, la pierre est claire. Il pleut, un cliché presque bienvenu. Miroslav est resté debout sous la pluie pendant des heures, à regarder cette couronne de fleurs qu'il a fait apparaître du bout de sa baguette.
L'eau s'est infiltrée sous ses vêtements, coule entre ses cheveux, ruisselle sur son visage. Il ne bouge pas, ne trouvant pas la force de détourner le regard de Jane.
Ils ont arraché son cœur, l'ont lacéré, piétiné, mutilé avant de lui rendre pour pouvoir mieux l'achever ensuite. Ils ont même volé son corps encore chaud, ce corps qu'il ne cesserait jamais d'aimer, cette femme qui ne cesserait jamais de lui manquer.
La guerre est finie. Ils le savent tous, le savent depuis longtemps. C'était sans espoir depuis le début. Ils se battent encore, toujours. Qu'ils continuent. Pour lui, c'est terminé. Il doit protéger ce qui lui reste de précieux en ce monde, quels que puissent être leurs secrets, quelques puissent être leurs démons. Qu'ils le détruisent lui, encore et encore. Tout, mais pas ses enfants.
1984« Non, Hamish. J'en ai fini avec la guerre. »1990Des bouts de verres crissent sous ses pas, le son perçant le silence opaque qui suinte des murs délavés. Des rais de lumières déchirent les fenêtres obstruées, plongeant la pièce dans une atmosphère dérangeante. Il projette une boule de lumière qui éclaire ce que Caligula appelait son atelier. Des toiles de toutes tailles jonchent les murs, certaines terminées, d'autres oubliées dans un coin et encore à moitié vides. Il y a un matelas défoncé à même le sol les draps qui le recouvrent sont désordonnés, comme si son neveu s'était levé il y a quelques heures à peine. Mais il est mort depuis des mois, rattrapé par ses démons et ses péchés funestes, entraînant Romy à sa suite dans les abysses.
Tu as vu, et tu n'as rien fait. Il touche du doigt ces tableaux dont la peinture semble encore fraîche à l’œil, œuvres vivantes et mouvantes animées par un génie aussi étrange qu'effrayant. Miroslav savait quel artiste était Caligula Von Shaft, porte drapeau du Lord, encenseur de la tyrannie, amoureux épris de ses ténèbres tortueuses. Tout le monde connaissait ses tableaux.
Mon fils est un meurtrier. Il ferme les yeux, entendant sa voix, la rondeur de ses r lorsqu'elle parlait en russe.
« Tu le savais. » Il sait que c'est injuste, il sait que la faute est la sienne et seulement la sienne. Il n'a pas été à la hauteur, ni pour lui, ni pour Romy. Il ouvre les yeux, observant la salle d'un œil fatigué. Tout ici semble être témoin de son échec, témoin de la tragédie qui a accablé ses enfants sans qu'il ne sache comment y mettre un terme.
La poussière recouvre le sol, les draps, les seringues et autres ustensiles qu'il retrouve ça et là. Il faudra qu'il s'occuper de vider cet endroit et de le vendre. Un portrait attire son regard et il y reconnaît le visage de Romy, à la fois beau et terrifiant, comme sorti tout droit d'un cauchemar enfantin. Sur une table basse, il découvre une lettre soigneusement fermée, adressée à celle-là même qu'il avait laissée derrière lui, plus détruite que jamais. Il la prend avec lui et l'observe un moment, hésitant un instant avant de la ranger dans la poche intérieur de sa cape. Il se relève, prêt à partir, lorsqu'un éclat brillant attire son œil.
Là, posée nonchalamment sur une boîte de tabac, trône la bague de fiançailles de Jane. Celle-là même qui avait été dérobée sur son corps, celle dont l'absence l'avait frappée lorsqu'il l'avait retrouvée dans les décombres. Son cœur manque un battement, et ce doute qui l'avait habité pendant toutes ces années revient le frapper de plein fouet. Il prend l'anneau entre ses mains, blessé par ce contact froid et devenu presque étranger.
Tu n'as rien fait, Miro. « Il avait tes yeux, » souffle-t-il, le cœur lourd, le cœur las.
1990Il se réveille en sursaut. Encore ce rêve, le même, encore et toujours. Il met quelques secondes à réaliser où il s'est endormi – le fauteuil dans la chambre d'Annie. Sa petite-fille dort paisiblement dans son lit à barreaux, et Miroslav soupire de soulagement. Annie est là, elle va bien.
Il se lève et s'approche doucement du lit pour la regarder, son esprit faisant petit à petit retomber l'adrénaline du cauchemar qui le hante nuit et jour. Il passe ainsi de longues minutes à réfléchir puis finit par descendre dans son bureau où il se saisit d'un morceau de parchemin et d'un stylo qui passe par là.
Hamish, écrit-il à la hâte.
Voudrais-tu déjeuner avec moi demain midi ? Cela fait bien longtemps que je n'ai pas pris de tes nouvelles. Amicalement, M.K.1994C'est un dimanche matin ensoleillé. Le petit appartement est baigné de lumière et de rires, alors que Annie est assise sur le canapé, occupée à remplir un puzzle à formes avec Nikkylia. Miroslav les observe avec un sourire, assis dans le fauteuil d'en face. Sa mère a repris énormément de force et de santé tout au long de ces dernières années, mais elle n'a plus jamais été la même aussi bien physiquement que mentalement. Miroslav n'a pas lâché l'affaire, redoublant d'efforts dans ses recherches pour trouver des soins adaptés aux maléfices qu'elle avait pu endurer. Il l'avait cachée pendant des années, la soignant loin des yeux du monde sorcier, signant ses papiers sous son nom de jeune fille. Elle avait passé des années alitée, plongée dans le coma pendant de longues périodes. Il avait réussi à lui faire récupérer la plupart de ses fonctions physiques, mais les dommages psychologiques étaient plus difficiles à réparer. Elle avait pu reprendre une vie presque normale cependant, et l'arrivée d'Annie avait eu l'effet d'une bouffée d'air frais.
« Oh, je ne crois pas que cela rentre, jeune fille. » Annie essaie tout de même, puis tente une deuxième fois pour vérifier. Elle éclate de rire, et son arrière-grand-mère l'imite bien vite. Miroslav sourit. Tout n'est pas parfait, loin de là. Mais une part de lui continue d'espérer, continue de vouloir se battre pour elle. Pour que sa vie soit meilleure que celle qu'ils ont connue.